Souvent pointés du doigt pour des erreurs, des prescriptions inutiles ou pour leur inertie au changement, les médecins nous rappellent régulièrement leur mission : mettre tout en œuvre pour soulager, soigner ou sauver la vie des patients. Lorsqu’à ses qualités s’ajoute l’audace, quelques pionniers ouvrent la voie à des grandes avancées.
Responsable du centre de traitement des brûlés de l’hôpital Saint-Louis (AP-HP), le Pr Maurice Mimoun fait partie de cette communauté médicale pour qui les limites de la science sont faites pour être dépassées.
En septembre 2016, l’équipe de chirurgie plastique et reconstructrice de l’hôpital parisien reçoit dans le service un homme de 33 ans brûlé sur la quasi-totalité (95 %) de la surface de son corps. Il a été victime d’un accident de travail. Ses chances de survie sont infimes.
« La peau brûlée est un poison pour le patient et lui envoie des toxines, cela peut toucher les organes vitaux et provoquer un état de choc », explique le Pr Mimoun.
Placé en coma artificiel par l’équipe du Pr Alexandre Mebazaa, anesthésiste-réanimateur, le patient risque aussi à tout moment de faire une infection, la peau ne jouant plus son rôle de barrière protectrice.
Commence alors une course contre la montre, que détaille Le Monde. Impossible de prélever de la peau saine sur le patient, elle est quasi inexistante. La chance va donner un coup de pouce à l’obstination des médecins.
C’est le frère jumeau homozygote (issu du même œuf) du blessé qui va faire don d’une partie de sa peau. Des fines couches de 5 à 10 cm de large prélevées sur le crâne, sur le dos et les cuisses. Trois opérations seront nécessaires pour effectuer ce transfert mais le patient greffé a, lui, subi une dizaine d’interventions.
Son patrimoine génétique étant identique à celui de son frère, il n’est pas soumis à un traitement immunosuppresseur mais à une rééducation. Aujourd’hui, il marche et mène une vie presque normale.
Cette nouvelle victoire médicale encourage les chercheurs qui tentent de mettre au point une « peau universelle » à partir de cellules souches. Elle souligne aussi la réactivité de l’Agence de biomédecine qui a rapidement donné son feu vert à la demande du Pr Mimoun. Elle montre aussi que le principe de précaution, trop souvent érigé, n’est pas toujours la réponse adaptée aux grandes prouesses médicales.