Les mauvais comptes de la Cour

Envié par de nombreux pays, le système de santé français est en danger. C’est du moins l’avis de la Cour des comptes qui pointe dans son dernier rapport sa fragilité. « Les déficits répétés de l’Assurance maladie depuis 25 ans et l’accumulation de la dette sociale qui en découle minent la solidité et la légitimité du système de  protection sociale ». Et les magistrats préviennent : ce sont les générations futures qui paieront notre incapacité à stopper cette gangrène.

L’équation est pourtant connue : les dépenses ne vont cesser d’augmenter alors que les recettes diminuent. Ainsi, les plus de 65 ans représenteront 26 % de la population en 2050 contre 17 % aujourd’hui. Avec les avancées de la médecine, l’espérance de vie va progresser, augmentant de fait le nombre de malades chroniques et donc coûteux. Enfin, la mise sur le marché de traitements innovants va alourdir la facture.

D’ores et déjà, constatent les auteurs du rapport, la couverture par l’Assurance maladie obligatoire montre des signes d’érosion. 14 % des dépenses de santé sont financées  par des complémentaires, ce qui place la France au premier rang des grands pays européens dans ce domaine. L’Allemagne pointe en deuxième position avec moins de 10 % !

Au passage, la Cour note que les dispositifs mis en place pour effectuer ces transferts ont coûté 3,4 milliards d’euros en 2016.

S’ils sont réels, les progrès pour maîtriser les dépenses ou pour rationnaliser l’offre de soins sont, note le rapport, largement insuffisants. Parmi « les réformes profondes » à conduire, la Cour préconise de faire peser la régulation sur les acteurs de la santé, en particulier les médecins libéraux. Avec des remèdes de cheval. Ainsi, ceux qui s’installeraient dans des régions à forte densité médicale ou qui ne se soumettraient pas à un recertification régulière ne seraient pas ou plus conventionnés. Idem pour les médecins du secteur 2 qui ne plafonneraient pas leurs dépassements d’honoraires. Et pour désengorger les urgences à l’hôpital, les auteurs demandent aux médecins d’ouvrir leur cabinet plus tôt le matin et de le fermer tard le soir. Sans oublier les permanences le week-end.

A ce stade, la charge est si lourde que l’on peut s’interroger sur la pertinence des propositions de la Cour des Comptes. Certes, ceux que l’on surnomme à tort les sages, sont là pour dénoncer les dérives, les abus, les gaspillages des finances publiques. A condition que les mesures préconisées soient ancrées dans la réalité et non la somme d’équations savantes.

D’ailleurs, ce n’est peut-être pas pour rien que, d’après les calculs de l’Irep (1), un think tank qui a épluché 73 rapports publiés par la Cour entre 2007 et 2012, 7 auraient été intégralement appliqués, 35 partiellement et 31 seraient rangés dans des tiroirs. Dans un rapport réalisé en 2015, le Sénat soulignait, de son côté, que la Cour des Comptes disposait d’un budget de 214 millions et employait 1 840 personnes sur le territoire ! Il ne viendrait à personne l’idée de de rapprocher les données de ces deux études pour évaluer l’efficience de l’institution de la rue Cambon !

(1) Institut de recherches économiques et fiscales

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