De la Manif pour tous à la Pma pour toutes

Partisans et opposants ont été saisis de la même façon mais pas pour les mêmes raisons. Cette semaine, le journal La Croix (1) publiait un sondage pour évaluer l’état de l’opinion au moment où doivent s’ouvrir des Etats généraux dans le cadre de la révision de la loi de bioéthique de 2011.
Six français sur dix se disent favorables à l’ouverture de la PMA à toutes les femmes, célibataires (57 %) ou homosexuelles (60 %), et deux tiers des personnes interrogées (64 %) donnent leur feu vert à la gestation pour autrui.
Enfin, la légalisation de l’euthanasie (47 %), le suicide assisté (18 %) ou les deux (24 %) sont, selon le sondage IFOP, des évolutions législatives à prévoir.
Mais que s’est-il passé entre La Manif pour tous qui revendiquait le maintien d’une structure familiale traditionnelle et la PMA pour toutes qui fait exploser le modèle classique de la filiation ? Serions-nous passés d’une société ancrée dans le conservatisme à un libéralisme qui s’affranchit des limites de la biologie ?
Ce grand écart apparent nous incite à éviter les raccourcis et à regarder l’arrière-plan du nouveau paysage qui se dessine.

D’abord, ces résultats montrent que les grandes manifestations contre le mariage pour tous de 2012 et 2013 n’étaient en rien un baromètre de l’opinion mais plutôt l’expression d’une petite minorité bruyante et agissante.
A cela s’ajoute la théorie du « jardin d’acclimatation » que décrit l’historienne Nadine Fresco dans le quotidien : « Dans cette dynamique, une innovation paraît tout d’abord scandaleuse (…) avant d’être progressivement acceptée, puis banalisée ».
Parallèlement, l’affirmation d’une liberté individuelle s’est imposée à mesure que la réponse collective montrait des signes de faiblesse. Sur des sujets comme celui de la vaccination ou, plus largement, dans la décision politique, l’effet protecteur s’est dilué.

Alors, faut-il craindre, comme le suggère La Croix, « cette étonnante disponibilité à de telles évolutions » ?
Comment passer du  » Un enfant quand je veux » à « un enfant comme je veux » sans fracturer de nouveau la société ?

Le 18 janvier, le Comité national d’éthique ouvrira les Etats généraux pour éclairer les décisions que devra prendre le législateur pour faire évoluer la loi. Cette consultation préalable est déterminante pour éviter de tomber dans le piège des idéologies des contraires, des anathèmes ou celui du « en même temps ».
Comment peut-on envisager l’ouverture de la PMA pour toutes sans remettre en cause le principe de gratuité des dons et celui de l’anonymat des donneurs ? Or, selon le sondage Ifop, neuf Français sur dix restent attachés à ces valeurs de générosité
Inévitable, la rémunération des mères porteuses nous conduira aux questions de la soumission humaine, de la condition féminine et d’une médecine de riches.
Que dire aux médecins qui seront les exécutants d’une euthanasie plus active alors qu’ils se sont engagés avec le serment d’Hippocrate à soulager et à soigner ?

Les questions posées touchent aux fondements de l’humain, les réponses apportées témoigneront de la vitalité de notre démocratie. Se limiter à un état de fait – « ça se fait à l’étranger, on ne peut pas y échapper »– serait la pire des conclusions et la meilleure façon d’escamoter les débats.

(1) Avec le Forum européen de bioéthique

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