Arrêts maladie : à qui la faute ?

Des médecins complaisants, des usagers tire-au-flanc, voilà ce que montrait cette semaine un reportage diffusé dans un journal d’une grande chaîne pour illustrer la hausse de 5,2 % des dépenses d’indemnités journalières (IJ) du régime général sur les douze derniers mois. Filmés en caméra cachée, deux médecins cédaient à la pression de patients qui réclamaient un arrêt de travail pour une fatigue passagère sans cause réelle. Donc, les coupables de cette envolée des IJ seraient ces fraudeurs à la petite semaine ? Pas si simple !

La facture de arrêts de travail s’élève à 10,3 milliards d’euros sur un an. Pour deux tiers, la forte croissance constatée ces dernières années est liée à l’augmentation du nombre de jours et, pour le reste, au montant des indemnités.

C’est à peu près tout ce que l’on sait. L’Assurance maladie, en effet, ne dispose pas d’outils pour expliquer les motifs de ces arrêts, et encore moins leur évolution. « La mention du motif médical n’est actuellement pas systématiquement vérifiée (…). Or la liquidation des indemnités journalières requiert de s’assurer de la réalité de la dépense », dénonçait en 2017 un rapport conjoint des Inspections des finances et des affaires sociales.

Faute d’éléments factuels, les experts avancent donc plusieurs causes. Certaines, d’ordre mécanique, seraient liées à la reprise de l’emploi et au décalage de l’âge du départ à la retraite. Plus de salariés, c’est plus d’arrêts de travail.

Les médecins privilégient d’autres hypothèses, plus structurelles. La précarité de l’emploi, la pression exercée sur le lieu travail ajoutée aux heures de transport, la course au rendement, l’absence de déconnexion lors des jours de repos ont affaibli physiquement les salariés et fragilisé leur adhésion aux valeurs de l’entreprise. « Tous les psychiatres de France vous diront que la souffrance au travail représentait un ou deux cas dans leur patientèle chaque année il y a dix ans, et qu’elle représente désormais une bonne moitié de leur activité », notait récemment, Eric Verhaeghe, fondateur du cabinet Parménide dans un entretien accordé au site Atlantico. Et pourtant, selon une étude réalisée en 2016 par l’organisme de prévoyance Malakoff Médéric, un salarié sur cinq renoncerait à un arrêt maladie pourtant prescrit par son médecin !

Montrer du doigt le prescripteur, c’est accuser le messager d’être responsable de la mauvaise nouvelle qu’il transmet. Ces symptômes sont l’expression d’une maladie beaucoup plus profonde qui ronge le monde du travail.

 

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