Plébiscité par le public, distingué à Cannes, le film 120 battements par minute a raflé six César lors de la dernière cérémonie parisienne. Une distinction pour un film coup de poing qui rappelle le combat radical des militants d’Act up contre l’ignorance, l’indifférence et les préjugés face au Sida. Mais cette reconnaissance reste du cinéma, la réalité est plus contrastée.
Alors que s’est ouverte ce vendredi la nouvelle édition du Sidaction (1), que plusieurs capitales, dont Paris, se sont fixées l’objectif zéro Sida à l’horizon 2030, les perceptions, l’approche sur le VIH ont-elles vraiment évolué ? La révolution des trithérapies a permis de transformer une maladie mortelle en maladie chronique. Cependant, chaque année dans le monde, un million de malades meurent du sida. En France, 6 000 personnes par an découvrent leur séropositivité dont 25 % à un stade avancé.
« Aujourd’hui, en 2018, confie à Libération Florence Thune, directrice du Sidaction, « nous sommes là pour affronter les vents contraires qui entravent notre combat. Des vents contraires qui banalisent la question du VIH et qui ne donnent pas assez d’espace aux jeunes pour parler sexualités ».
Un sondage Ifop (2) publié cette semaine confirme ces craintes. Un jeune sur cinq de 15 à 24 ans s’estime mal informé sur le VIH. A ce manque d’information s’ajoutent des fausses croyances. Ils sont autant à croire que l’on peut être contaminé après un baiser avec une personne séropositive ou par la transpiration. Et, en dépit des campagnes de prévention, 26 % de cette population (13 % en 2009) reste persuadée que les médicaments permettent aujourd’hui de guérir du sida. C’est sans doute l’une des raisons qui ont conduit 18 % d’entre eux à s’exposer au moins une fois à un risque de contamination.
Face à cette méconnaissance que soulignent régulièrement les enquêtes d’opinion, les gouvernements se sont dispensés d’un examen de conscience. « Parmi les 12 millions de jeunes scolarisés chaque année, seule une petite minorité bénéficie tout au long de leur scolarité de séances annuelles d’éducation à la sexualité comme la loi l’a prévu », rappelait en juin 2016, un rapport du Haut Conseil à l’égalité entre les hommes et femmes. Les auteurs précisaient également que 25 % des écoles ayant répondu à leur questionnaire avaient déclaré n’avoir mis en place aucune ou séance en matière d’éducation à la sexualité.
Les rapporteurs mettaient en avant le manque de moyens financiers, de disponibilité des personnels mais ils dénonçaient également « les blocages d’une société tout entière » sur le sujet. Alors que d’autres pays, comme la Suède, les Pays-Bas ou le Canada ont fait la démonstration de l’efficacité d’une éducation positive et égalitaire de la sexualité, la France garde une approche « sanitaire, restrictive et moralisatrice », concluait le Haut Conseil en ajoutant : « les jeunes se tournent vers Internet, et notamment les réseaux sociaux, les media ou encore la pornographie pour trouver des réponses aux questions qu’ils se posent sur la sexualité ».
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(2) Sondage Ifop et Bilendi pour Sidaction réalisé par questionnaire auto-administré en ligne du 6 au 13 février 2018 auprès de 1002 personnes, représentatifs de la population française âgée de 15 à 24 ans.