Faut-il obliger « les prédateurs sexuels » à subir une castration chimique pour limiter les récidives. Oui, répond sans hésitation Laurent Wauquiez. Cette proposition du président du parti Les Républicains (LR) intervient après le viol et le meurtre il y a une quinzaine de jours près de Lille d’Angélique, une jeune fille de 13 ans. Placé en détention, l’auteur présumé, David Ramault, avait été condamné en 1996 pour viol avec arme sur une mineure de moins de quinze ans. Il était inscrit au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions sexuelles.
« Comment se fait-il que cet homme déjà condamné pour viol ait pu être remis en liberté sans surveillance ? », s’est exclamé l’un des chefs de file de l’opposition au moment où les députés doivent examiner le projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes. La castration chimique, lui a répondu aussitôt Marlène Schiappa, qui porte ce projet de loi avec la ministre de la Justice, « ce n’est pas efficace. Factuellement, ce n’est pas une solution qui a fait ses preuves ».
Si ce débat est de nouveau ouvert sur la scène politique, les éléments de réponse sont sur la table depuis des années.
En France, recense l’Ined, chaque année 553 000 femmes subissent une agression sexuelle et 62 000 sont victimes de viol ou de tentative de viol. Selon le ministère de la Justice, un quart des délinquants sexuels et 5 % des auteurs de crimes sexuels récidivent.
La loi française permet déjà au juge d’ordonner une injonction de soins à une personne condamnée pour agression sexuelle. Mais c’est au délinquant en accord avec son médecin que revient la décision sur la nature du traitement. La castration chimique fait partie de l’arsenal thérapeutique mais ni le médecin ni le juge ne peut contraindre l’individu à s’y soumettre.
Une note de synthèse du Sénat portant sur le recours à ce procédé dans différents pays rappelait en 2009 que la plupart d’entre eux le font sur la base du « volontariat ». Pour des infractions sexuelles sans recours à la violence, cette méthode peut se substituer à l’incarcération ou être proposée durant la peine de prison pour des délits aggravés. « Les détenus qui n’y participent pas ne peuvent prétendre à des remises de peine ou à libération conditionnelle », rappelaient les sénateurs.
Contrairement à ce que semble indiquer Laurent Wauquiez, la castration chimique n’est pas la panacée. D’ailleurs, les spécialistes préfèrent employer le terme de camisole chimique. En effet, les médicaments utilisés limitent l’action de la testostérone, l’hormone qui agit sur le désir et l’érection. Mais leur durée d’action est de trois mois et, dans la grande majorité des cas, les patients retrouvent une libido normale après. Cet effet réversible oblige donc à renouveler le traitement de manière régulière. Difficile d’exercer des contrôles sur toutes les personnes traitées.
Prise de poids, bouffées de chaleur, d’autres experts mettent en avant les effets secondaires des molécules utilisées en tout en rappelant que les bases scientifiques de leur efficacité ne sont pas clairement établies.
C’est exactement ce que dénonce le Dr Serge Stoléru (Inserm), « Aucune recherche nouvelle n’est faite depuis dix ans alors que sur le site de la Haute autorité de santé, on voit que les rédacteurs demandent des travaux méthodologiquement adéquats depuis juillet 2006, confie à Allodocteurs ce spécialiste.