PMA pour toutes : le jeu de quilles

« Longtemps contre », il est aujourd’hui, « à titre personnel (…). plutôt favorable et je crois qu’on peut y aller ». Ce jeudi, sur le plateau de L’Emission politique sur France 2, le Premier ministre s’est prononcé en faveur de l’extension de la PMA aux femmes célibataires et aux lesbiennes.
Comme des millions de Français, Edouard Philippe s’est mis au diapason de l’évolution de notre société. Monoparentale, homoparentale ou recomposée, la famille française est devenue plurielle et le modèle traditionnel en est désormais une composante.

En ce sens, l’avis rendu cette semaine par le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) est une brillante démonstration de l’ouverture de la science au monde tel qu’il est. Avec leur président, le Pr Jean-François Delfraissy, les membres du CCNE ont fait un travail remarquable pour tenter d’apaiser « la tension entre l’intime et le collectif ». Avec des avis rendus sur les examens génétiques, les cellules souches embryonnaires, la transplantation ou le numérique en santé, le Comité a rassemblé « des repères » dans « le respect de la dignité de la personne humaine ». Le résumé de l’avis fixe l’ampleur de la tâche des experts : « il existe un écart entre ce qui est techniquement possible et ce qui est éthiquement souhaitable, un écart qui légitime la réflexion éthique, en prenant notamment en compte ce que l’on peut anticiper de l’impact des applications d’aujourd’hui sur le futur de l’humanité.

L’exemple de la PMA ouverte à toutes est emblématique. La sexualité n’ayant plus une finalité prorcréatrice, le « souhait pour un couple de faire un enfant (…) est devenue une revendication partagée », souligne le CCNE. En se déclarant favorable, le comité d’éthique répond donc à « une souffrance induite par une infécondité résultant d’orientations personnelles ».

Un verrou saute mais le plus difficile reste à faire. Le gouvernement doit « transformer » cet avis dans le cadre de la révision de la loi bioéthique en tentant de calmer les opposants farouches à cette évolution.
Mais surtout, l’ouverture de la PMA va servir de jeu de quilles dans la réflexion sur les principes qui régissent les dons. Elle « doit être confrontée à la rareté actuelle des gamètes », admet d’ailleurs le CCNE. Près de 3 500 nouveaux couples souffrant d’infertilité médicale (1) s’inscrivent chaque année pour bénéficier d’un don de gamètes, relève l’Agence de biomédecine. Le nombre de dons pour les prendre en charge est estimé à 1 400 pour le don d’ovocytes et 300 pour le don de spermatozoides. Pour ce dernier, seulement 255 donneurs se sont présentés en 2015. Résultat, les délais d’attente des couples sont déjà de l’ordre de 1 à 3 ans.

Comment va-t-on encourager les dons de sperme pour satisfaire les nouvelles demandes ? D’autant que le CCNE est favorable à la levée de l’anonymat des futurs donneurs. Cette proposition, si elle retenue, risque de freiner les élans altruistes.
Le principe de gratuité du don va donc immanquablement se poser.

(1) En 2015, près de 25 000 enfants sont nés avec les techniques de PMA ou (AMP), soit 1 naissance sur 30.
96% des tentatives sont réalisées avec les gamètes des deux membres du couple. Dans 4% des cas, les tentatives utilisent des spermatozoïdes, des ovocytes ou des embryons issus de don.

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