Prothèses mammaires : un bénéfice et des risques

Comment informer sans créer la panique, comment prendre le temps de l’expertise sans être taxé de laxisme ? A ces questions, les spécialistes de la santé publique n’ont pas trouvé en France les réponses adéquates. L’affaire du Levothirox et, plus récemment, celle des bébés nés sans bras illustrent le décalage entre le vécu des patients ou des parents et la réaction des pouvoirs publics. Défaut d’information, procédure d’évaluation tardive, la machine sanitaire s’enraye. Même lorsque les circuits de décision sont respectés.

Dernier exemple, les implants mammaires. Cette semaine, l’Agence de sécurité sanitaire des médicaments (ANSM) a annoncé qu’elle procèderait au début de l’année prochaine à une réévaluation de ces dispositifs utilisés lors de chirurgies reconstructrices (20 % des implantations) et esthétiques (80 %).
Cette décision fait suite au recensement depuis 2011 de 53 cas d’un cancer de forme rare, le lymphome anaplasique à grandes cellules (LAGC), parmi les 500 000 femmes porteuses d’implants mammaires, principalement à enveloppe texturée. Ce type de lymphome n’a pas été constaté au niveau du sein dans le reste de la population féminine.

Déjà, en 2010, le scandale de prothèses défectueuses PIP avait suscité une psychose dans ce secteur. C’est même à la suite de cette affaire que les autorités sanitaires avaient décidé de renforcer la surveillance de ces dispositifs médicaux.
En 2015, Agnès Buzyn, alors présidente de l’INCa (1), confirmait que 18 femmes porteuses de prothèses mammaires étaient atteintes de ce nouveau type de lymphome.

Il y en a trois fois plus aujourd’hui. Alors, pourquoi attendre 2019 pour statuer au risque de créer un nouveau vent de panique ? Avant de « prendre une décision », l’ANSM compte réunir les 7 et 8 février un comité d’experts chargés d’auditionner des patientes, des chirurgiens, des professionnels de santé « pour, dit-elle, bénéficier d’un éclairage global sur l’utilisation de ces implants ». C’est à l’issue de cette consultation et des investigations scientifiques menées en parallèle que l’Agence se prononcera.

En attendant, l’agence sanitaire recommande aux professionnels de santé d’informer les femmes qui souhaitent avoir recours à cette chirurgie et d’utiliser de préférence des prothèses mammaires à enveloppe lisse.
Ce sont celles à surface texturée qui sont aujourd’hui sous étroite surveillance, d’autant qu’elles représentent 85 % du marché. Cette paroi rugueuse donne un meilleur rendu et permet de mieux maintenir l’implant. Mais, selon les hypothèses avancées par les spécialistes, elle pourrait aussi provoquer une réaction inflammatoire et, dans des cas très rares, conduire à un lymphome.

Les 500 000 femmes déjà porteuses d’implants devront donc attendre trois longs mois avant de savoir si la balance bénéfice-risque penche en leur faveur et remonter à 2015 pour trouver quelques conseils. Selon les experts de l’Inca , les femmes porteuses d’un implant mammaire et sans signe clinique au niveau des seins n’ont aucune raison  de modifier leur suivi médical.
Pour celles qui constatent un épanchement abondant, une augmentation de volume, une douleur, une lésion de la peau au niveau du sein, une consultation médicale s’impose.

Au micro d’Europe1 ce vendredi, la ministre de la Santé a renouvelé ces recommandations tout en rappelant que le risque zéro n’existe pas en médecine.

(1) Institut National du Cancer

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