C’est un appel d’urgence que viennent de lancer un collectif de cinquante sociétés savantes médicales et des associations de parents en faveur d’une généralisation du dépistage et d’une vaccination universelle contre les papillomavirus humains (HPV). En France, ils sont à l’origine chaque année de 6 300 cancers (1) dont 2900 du col de l’utérus. Ce dernier est à l’origine de 1 100 décès par an. « C’est l’un des seuls cancers dont le taux de survie à 5 ans est en diminution », notait en 2017 la Haute autorité de santé.
Et pourtant la fatalité n’est pour rien dans cette hécatombe. Des solutions existent pour le combattre. Encore faut-il les appliquer. Proposé aux femmes de 25 à 65 ans tous les trois ans, le dépistage peine encore à s’imposer dans le pays. 40 % des femmes, en moyenne, ne l’avaient pas réalisé́ au cours des trois dernières années, se désolait en 2017 Santé publique France.
Mais surtout, le vaccin, qui permet de se protéger de 60 à 90 % des lésions pré-cancéreuses, est boudé par la France. Il est aujourd’hui proposé aux jeunes filles de 11 à 19 ans et aux hommes ayant des relations homosexuelles jusqu’à 26 ans. Moins d’un quart des adolescentes sont correctement vaccinées (deux injections) alors que l’objectif est de 60-70 %.
Dans sa tribune, la communauté médicale appelle à « une vaccination universelle gratuite et remboursée » pour les filles et les garçons. L’infection se transmettant par voie sexuelle, la vaccination de la population masculine contribuerait à limiter la circulation du virus et à réduire le nombre de cancers de l’anus et oropharyngés.
Face à la méfiance vaccinale qui ramène parfois la France sur la voie de l’obscurantisme, le collectif entend rétablir la « vérité scientifique » sur « ces vaccins actifs et très bien tolérés ». Plus de 20 pays, rappelle-t-il, ont développé avec succès une stratégie de vaccination universelle. Mais la démonstration la plus éclatante vient de l’autre bout de la planète.
En Australie, une étude épidémiologique publiée l’an passé dans le Lancet Public Health a montré que le pays n’aura plus de nouveau cas de cancer du col de l’utérus dans les vingt ans. Les résultats sont déjà probants. Entre 2005 et 2015, le nombre de femmes de 18-25 ans porteuses des principaux virus en cause dans la maladie est passé de 23 à 1 %. Les campagnes de vaccination lancées auprès des adolescentes depuis 2007 et complétée par celle des garçons en 2013 permettent d’afficher aujourd’hui un taux de couverture vaccinale de 80 % chez les Australiennes et de 75 % chez les Australiens. Ces résultats vont permettre de stopper la circulation du papillomavirus.
Dans les prochaines semaines, la HAS doit se prononcer sur l’opportunité d’une vaccination universelle dans l’Hexagone. Les auteurs de l’Appel redoutent que cette décision soit retardée. « Un décalage dans le temps, estiment-ils, placerait une nouvelle fois la France comme un pays à contre-courant sur cette vaccination HPV ». Et ce ne serait pas la première fois en matière de vaccination.
(1) Col de l’utérus (2900), pharynx (amygdales, 1400), anus (1512), vulve, vagin, pénis (500).
