E-cigarette : San Francisco n’est pas la France

Envoyé de San Francisco, le signal a fait le tour du monde. La ville démocrate de la Californie a décidé cette semaine d’interdire la fabrication, la vente dans les magasins et la distribution de cigarettes électroniques. Cette mesure, une première aux Etats-Unis, adoptée à l’unanimité par les élus municipaux, devrait s’appliquer à partir de l’année prochaine. La possession et l’usage des e-cigarettes, eux, ne sont pas interdits.
Ce vote reste néanmoins provisoire, le temps que la FDA (l’agence de sécurité des médicaments et des aliments) statue sur la balance bénéfices-risques de ce produit. L’avis est attendu en 2022, précise Le Monde !

Alors que cet Etat a légalisé en 2017 l’usage récréatif du cannabis, pourquoi la ville symbole du progressisme américain adopte-t-elle un principe de précaution aussi radical pour la e-cigarette ? Entre 2017 et 2018, le vapotage a augmenté fortement au collège et de 78 % chez les lycéens, font valoir les autorités sanitaires. Ses représentants ont encore en mémoire le combat acharné mené – avec succès – pendant 20 ans contre les géants du tabac. Pas question, disent-ils, de revivre un scénario comparable avec la cigarette électronique.

D’autant que ce sont les mêmes acteurs qui sont aux commandes. Le leader du marché de la cigarette électronique, Juul, est détenu à 35 % par Altria Group, la maison mère de Marlboro. Depuis des mois, ces as du maketing installés justement en Californie ont développé des trésors d’ingéniosité pour attirer une clientèle jeune. Design, couleurs, arômes, campagnes virales, tout a été pensé  pour transformer, ce produit en objet tendance. Et pour bien enfoncer le clou, la société n’a pas hésité à investir 10 millions de dollars en 2019 en campagnes de publicité.

Cette nouvelle guerre entre les chevaliers de la santé publique et les géants du tabac peut-elle s’exporter dans d’autres pays, notamment en France ? Non, en tout cas pas dans l’immédiat. Depuis mai 2016, la publicité directe pour la cigarette électronique est interdite dans l’Hexagone. Cela n’empêche pas certains opérateurs de contourner la loi en installant dans des bars et des lieux festifs des stands pour séduire les ados.

Mais surtout, les études menées jusqu’à présent démontrent plutôt l’intérêt de la cigarette électronique dans une démarche de réduction des risques. 700 000 personnes ont arrêté de fumer avec l’aide de la e-cigarette depuis son arrivée en France, note le Baromètre de Santé Publique France, publié cette semaine. 80 % des vapofumeurs ont réduit leur consommation de tabac avec la cigarette électronique (10 cigarettes de moins par jour).

Menée par téléphone auprès de 25 000 personnes âgées de 18 à 75 ans, cette enquête confirme que les vapoteurs ont tous ou presque une expérience avec le tabac. Et à ceux qui prétendent que ce produit est une porte d’entrée vers la cigarette, l’étude ESCAPAD 2017 rappelait que 3,8 % des non-fumeurs de 17 ans avaient vapoté.

Aujourd’hui, la prévalence du vapotage dans la population 18-75 ans s’élève à 3,8% et à 2,7 % pour les vapoteurs quotidiens. Pourtant autant, les usagers ne nient pas les risques potentiels de ces produits et sont plutôt d’accord avec l’interdiction de vapoter dans les lieux publics.
Nombre d’entre eux seront présents au Sommet international de la Vape qui se tient à Paris le 14 octobre prochain. Très engagée sur le front de la lutte contre le tabac, Agnès Buzyn participera-t-elle à ce rendez-vous ? Les chiffes produits cette semaine par Santé Publique France devraient l’inciter à sortir d’une neutralité qui l’éloigne de plus en plus de la réalité.

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