Réconcilier le citoyen avec la santé publique

Dépistage, vaccination, les campagnes de prévention et de santé publique sont-elles ajustées à l’évolution de notre société et aux progrès de la médecine ? Si le principe et l’intérêt d’une protection collective ne sont pas remis en cause dans le monde médical et chez les citoyens, de plus en plus d’experts pointent les failles d’un système qui néglige l’individu au profit de la collectivité. Au point de susciter la défiance, voire le rejet d’une partie de l’opinion.

Un mouvement corroboré par un constat et des chiffres. Moins d’une Française sur deux de 50-74 ans participe au programme national de dépistage du cancer du sein (une mammographie tous les deux ans). Or, c’est le plus fréquent des cancers chez la femme et le plus meurtrier. 54 000 cas sont diagnostiqués tous les ans et 12 000 femmes décèdent.
« La réticence vient de l’angoisse du résultat, de la peur que l’examen fasse mal, de son dénigrement sur Internet », expliquait mardi un spécialiste dans les colonnes du Parisien. L’Union européenne a donc décidé de financer une étude portant sur une approche individualisée du dépistage, en complément des programmes nationaux existants. Coordonnée par Unicancer et relayée, en France, par le réseau d’hôpitaux spécialisés en oncologie, cette surveillance devrait toucher 20 000 femmes (85 000 en Europe). Baptisée My Personal Breast Screening (MyPeBS), elle permettra d’évaluer le risque individuel chez les femmes à partir de 40 ans pour adapter la fréquence du dépistage .

Autre fléau pour les femmes, le cancer du col utérin (CCU). 2 920 cas ont été diagnostiqués en 2018 dont 40 % chez des femmes de moins de 50 ans. 1 117 décès ont été enregistrés. Pourtant, souligne le BEH (1) publié cette semaine, « nous possédons des armes efficaces » : la vaccination contre le papillome humain (HPV) et le dépistage par frottis cervico-utérin. Mais les résultats de ces préventions primaires et secondaires sont médiocres, voire mauvais au regard des performances affichées par nos voisins européens.

Seulement 59 % des femmes concernées par le programme de dépistage triennal (25 à 65 ans) l’effectuent ; ce taux descendant sous la barre des 50 % à partir de 50 ans. Le BEH relève également d’importantes disparités géographiques allant de moins de 50 % dans les territoires d’Outre mer à plus de 60 % en Auvergne-Rhône-Alpes et en PACA. Les auteurs de l’étude préconisent de « faciliter l’accès au dépistage dans certains territoires » et  de « cibler les campagnes et les outils de communication vers les femmes de plus de 50 ans ».

« Très insuffisante ». C’est ainsi que le BEH qualifie les résultats de la vaccination HPV. Elle est recommandée dès l’âge de 11 ans chez les jeunes filles. Alors qu’une couverture vaccinale à 85 % permettrait d’éviter 377 cancers du col de l’utérus et 139 décès par an, le taux effectif est de 29,4% pour une dose à 15 ans et 23,7 % pour le schéma complet à 16 ans.
Alors, comment faire pour que la France ne soit plus « l’un des pays occidentaux avec la plus faible couverture vaccinale » ? Par des « approches multicomposantes » avec des actions différentes ciblant les jeunes, les parents, les professionnels, les départements et les catégories sociales les plus affectés, répondent les auteurs du BEH. L’information, notamment à l’école, des systèmes de rappel, la mobilisation des professionnels de santé, l’implication des parents sont de nature à surmonter le principal obstacle : « l’hésitation vaccinale ».
Car, si la quasi totalité des parents (93 %) et des adolescents (95 %) qui ont entendu parler du vaccin contre le HPV ont conscience du danger de l’infection, plus de la moitié d’entre eux (54 %) pensent qu’il peut provoquer des effets secondaires.

Convaincre plutôt qu’enjoindre, préférer une communication adaptée aux principales cibles à un slogan passe-partout, répondre aux inégalités géographiques et sociales, mobiliser les professionnels de santé et les enseignants, c’est au prix de ces opérations vérité que les pouvoirs publics réussiront à réconcilier chaque citoyen avec la santé publique.

(1) Bulletin épidémiologique hebdomadaire

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