« Je suis comme les victimes, je suis inconsolable ». Ce mercredi 16 octobre, une vague d’émotion a traversé la salle du tribunal correctionnel de Paris dans laquelle se tient depuis le 23 septembre le procès du Mediator, cet antidiabétique prescrit à tort comme un coupe-faim.
A la barre, la pneumologue de Brest, Irène Frachon, explique depuis des heures comment elle a « échappé de très peu à la tromperie de Servier ». Celle, dont l’obstination a permis de révéler ce scandale sanitaire, n’est plus une simple lanceuse d’alerte. Elle est devenue la porte-parole des victimes, certaines décédées, d’autres bâillonnées par les accords financiers noués avec le laboratoire ou celles encore dont la vie est ralentie à cause d’une valvulopathie.
Ce procès va durer six mois mais il marque une étape importante dans la façon dont les citoyens font valoir leur droit en matière de santé. Les « remettre au milieu des débats », comme l’a indiqué un avocat des parties civiles.
Que ce soit vis-à-vis de la justice, du corps politique, des institutions ou des industriels, le rapport de soumission ou de dépendance dans lequel le consommateur était enfermé glisse vers une relation où la transparence, l’intérêt de chacun et de la santé publique deviennent des déterminants.
Aujourd’hui, des porte-voix accompagnent cette transition. Ils sont médecins dans l’affaire du Mediator pour faire reconnaître le préjudice des victimes.
Ils peuvent aussi accompagner les consommateurs dans leur volonté de manger en connaissant le contenu de leur assiette. Ainsi, plusieurs scientifiques et associations viennent de lancer une pétition qui a recueilli 70 000 signatures pour rendre le dispositif Nutri-Score obligatoire à l’échelle européenne. Apposé sur les emballages alimentaires, cet étiquetage permet d’identifier en un clin d’œil les produits favorables à la santé. Ce code couleur, initié en France en 2017, s’est déjà exporté en Espagne, en Belgique et en Allemagne. Cette bataille citoyenne n’est pas gagnée mais déjà plusieurs industriels ont adopté cette mention volontairement. D’autres ont élevé la qualité nutritionnelle de leurs produits pour s’attirer les faveurs du public.
Et quand ce ne sont pas les blouses blanches, ce sont les édiles de petites communes qui font entendre leur voix. Comme celle de Daniel Cueff. Le maire de Langouët en Bretagne vient de comparaître devant le tribunal administratif pour avoir pris un arrêté interdisant l’épandage de pesticides à une distance inférieure à 150 mètres des lieux de vie. Si le jugement sur le fond n’a pas été encore rendu, déjà la liste des arrêtés anti-pesticides s’allonge. Une centaine de villages l’aurait signé, selon le Figaro. Interrogée par le quotidien, la présidente de la Fédération national des exploitants agricoles (FNSEA) prend acte et se déclare prête à « adapter les pratiques culturales ».
Aux quatre coins de la France, un mouvement est en marche. Il n’est pas politique, n’a pas d’ambition présidentielle. Il témoigne simplement d’une volonté du citoyen de prendre sa santé en main.